Ce n’est pas un canular. L’information est livrée par une étude de l’ONG “Pole Institute” basée à Goma dans le Nord-Kivu, à travers un rapport intitulé «Financement des groupes armés à l’Est de la RD-Congo, fondement d’une économie criminelle/ Cas de la Province du Nord-Kivu».
Le document renseigne que les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda -FDLR- contrôlent les terres du parc National de Virunga, d’où elles ont organisé cette filière prospère dans la production de braise. Celle-ci dessert la ville de Goma. À en croire ce rapport d’étude, la part de ce groupe armé rwandais dans le commerce de la braise s’élève à USD 11. 671. 809,4. Ce, en plus du fait que ces rebelles rwandais se font également de l’argent dans l’imposition des taxes aux paysans RD-congolais pour l’accès aux terres à cultiver et la perception des taxes sur les produits.
Selon le directeur du Parc national de Virunga, Emmanuel Demerode, cité par “Pole Institute”, «les FDLR s’adonnent à une exploitation quasi industrielle du charbon de bois du parc en vue de répondre à la demande de l’immense marché de la ville de Goma qui compte 1 million d’habitants dont 97% n’ont pas accès à l’électricité».
S’appuyant sur des informations collectées aux dépôts des points d’entrée de Mugunga et Munigi en novembre 2019, l’étude chiffre à près de 4.373 sacs de braise vendu par jour, soit 218, 65 tonnes le jour. 79. 870,25 tonnes l’année. «Les fournisseurs de la braise sont les FDLR”.
Les principaux ennemis de ces dernières sont les gardes du Parc National de Virunga. “Et des éléments des FARDC sont complices des FDLR dans la production de la braise», renseignent les habitants de Katemba dans le Territoire de Rutshuru et ceux de Kilimanyoka dans le Territoire de Nyiragongo, interrogés par Pole Institute en décembre 2019.
Quand le crime répond à un besoin vital de la population !
Le besoin de la ville de Goma en énergie électrique est estimé à 23 Mégawatts. «Pourtant, cette ville ne reçoit même pas la moitié des 5 Mégawatts qu’elle devrait recevoir du barrage hydroélectrique de la Ruzizi», lit-on dans le rapport. Et d’ajouter: «En conséquence, la population de la ville de Goma consomme essentiellement du charbon de bois comme principale source d’énergie».
Selon un rapport du Fonds Mondial pour la Nature, Goma consomme jusqu’à 150. 000 tonnes de charbon de bois chaque année. Chiffre atténué par d’autres ONG dont WWF qui situe cette consommation entre 60.000 et 90.000 tonnes l’année.
Un circuit bien organisé
L’étude de Pole Institute apprend que les FDLR n’interviennent pas directement dans le transport et la vente de la braise qu’elles produisent.
Ces rebelles rwandais recourent à des intermédiaires commerciaux congolais. «Les FDLR fournissent de la braise aux intermédiaires commerciaux, qui à leur tour l’exposent sur les marchés dans les centres de consommation. Les produits de la vente reviennent aux FDLR en passant par les intermédiaires commerciaux selon les clauses de leurs accords», souligne le rapport.
Par ailleurs, le rapport de Pole Institute affirme que le prix d’un sac de braise à Goma comprend plusieurs rubriques représentant des parts des agents impliqués dans le circuit de distribution.
Parmi ces agents impliqués, le rapport cite en dehors des FDLR, grossistes, transporteurs, des détaillants, les pouvoirs publics et services de renseignement et sans oublier la grande muette.
«Sur toute l’année, les FDLR et leurs représentants (appelés) patrons perçoivent près de USD 20. 000. 000 soit USD 11. 671. 809,4 pour les FDLR et USD 8. 215. 157,2 pour les fameux patrons», indique le rapport. Et de poursuivre: «Les transporteurs s’emparent de USD 4,9 par sac de 50 kg… Les services de l’Etat (…) perçoivent par sac de braise près de USD 2,6 USD, soit 9,2 %. Les transporteurs empochent donc 6,4 % et les agents chargés de la manutention de 2 %. Les grossistes en relation directe avec les FDLR gagnent par sac USD 2,95 USD et les USD détaillants 2,84».
Drame écologique
Avec ce commerce aussi florissant que criminel, le Parc national de Virunga subit une destruction continue orchestrée par les FDLR qui y ont trouvé leur Eldorado après avoir perdu ses positions dans le Sud-Kivu ainsi que l’Ouest de la Province du Nord-Kivu, et ses principales sources de revenu. «Cette activité destructrice (est une) stratégie de survie des FDLR, un moyen de combler le manque à gagner qu’elles subissent pour avoir perdu le contrôle d’autres sources des revenus, notamment les minerais et les riches terres agricoles d’où elles avaient été chassées par la pression des FARDC et des autres groupes armés».
René Kanzuku
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