08/12/2024

Le Regard

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Le rôle de la société dans la lutte contre la corruption dans le secteur judiciaire congolais

La corruption entraîne des inégalités sociales, d’accès à la justice, la perte de confiance des populations envers leurs dirigeants et fragilise l’Etat. Le manque de morale ou d’éthique des agents publics, l’impunité des actes de corruption ainsi que la recherche des gains faciles ont été identifiés parmi les causes de la corruption dans le monde.

Jean-Pierre OKENDA, juriste et militant des droits de l’homme dans le secteur extractif pense que les réformes du secteur judiciaire doivent être inclusives. Elles ne peuvent être bien faites qu’avec la consultation de la société civile car la qualité des réformes dépend en majeure partie des approches qu’on adopte «Nous devons immuniser la classe politique contre la corruption et la rendre redevable », a déclaré le Juriste.

Selon Me Jean-Pierre, la société civile doit avoir une meilleure compréhension du fonctionnement du système judiciaire, de ses acteurs, leur sphère d’influence afin d’arriver à faire des propositions concrètes qui vont dans le sens de renforcer l’indépendance des acteurs judiciaires, de les immuniser contre la caporalisation du système et surtout renforcer le rôle de la redevabilité des acteurs judiciaires.

«Nous devons être en mesure d’identifier les points d’entrer de la corruption pour mieux les boucher. Une des entrées de la corruption dans le secteur judiciaire est la liberté provisoire», a-t-il indiqué.

Pour Me OKENDA, les conditions désastreuses des détentions occasionnent la corruption parce que les justiciables n’ont pas une autre option que de secouer les poches pour recouvrer la liberté.

Le rapport publié en Mai dernier par la cour des comptes de la République Démocratique du Congo était très accablant sur la gestion des recettes mobilisées par les cours et tribunaux. A l’issue d’un audit auprès de 43 entités, il s’est constaté un système de corruption et de détournements des deniers publics.

D’après les statistiques présentées par la cour des comptes, les recettes réalisées en RDC en 2019 étaient de 3.88%, en 2020 3.59%, en 2021 1.76% et en 2022 1.58%. La perception des mains des justiciables et la détention des frais de justice par des personnes non habilitées, les amendes et les cautionnements de mise en liberté provisoire ainsi que les autres frais connexes généralement illicites favorisent le détournement des recettes non canalisées au trésor public.

D’après Monsieur Ernest MPARARO, Président de la ligue Congolaise contre la corruption (LICOCO), les faits de corruption en milieu judiciaire ne sont plus à démontrer. « les détournements des recettes judiciaires, les paiements de pots de vins ont fragilisé l’appareil judiciaire », a-t-il déclaré.

D’après l’acteur de lutte contre la corruption, l’engagement de tout un chacun dans la lutte contre la corruption est indispensable. La société civile doit continuer à faire pression dans tous les sens pour que les acteurs politiques prennent en compte la lutte contre la corruption dans toutes les thématiques afin de lutter contre ce fléau, recommande-t-il.

Pour rappel, en droit congolais, la corruption est prévue et punie aux articles 147 à 149 du code pénal Congolais livre II. Elle est punie de 6 mois à 15 ans de servitude pénale principale et d’une amende allant de Cinquante mille à un million de Francs Congolais.

Flore KAYALA MUKALA