«Le peuple d’abord», ce slogan si séduisant continue encore à susciter des acclamations rien qu’à sa simple évocation. Le discours du Président de la République le lundi 14 décembre 2020 dernier l’a prouvé. Cependant, cette priorité omniprésente dans le discours du Président Félix Antoine Tshisekedi semble n’avoir, à ce jour, qu’une nécessité rhétorique.
Dans les faits, le peuple est toujours astreint à la patience. Ses réels besoins sont toujours relégués au second plan. Tiens. C’est depuis le 24 janvier 2019 que le pouvoir se trouve -en principe- sous les bois de la 11ème rue Limete. Ce qui fera, dans quelques jours, deux bonnes années. La question du bien-être de la population n’a jamais été au centre du débat politique. Pas encore. Pourtant, les débats n’auront pas manqué: Président pantin, nomination des gestionnaires de la Gecamines, déboulonnage du système Kabila, nomination à l’armée, la police, la justice, démission de Tunda Yakasende,… nomination des juges, leur prestation de serment, violation de la constitution, dissolution du parlement,… Que des débats, que des polémiques qui ont réquisitionné l’attention de toute l’intelligentsia du sérail présidentiel. Que des problèmes qui renvoient aux calendes grecques la matérialisation du «peuple d’abord»!
Sa misère n’est pas si grave…
Entretemps, dans les parlements debout -UDPS- qui ont récupéré tous les ronds-points autrefois occupés par le PALU, aussi bien que dans des foyers RD-congolais, les réelles préoccupations de la population, connues depuis des décennies, demeurent. Le délestage du courant électrique s’est davantage démocratisé, l’eau potable ne coule plus, la vie devient de plus en plus chère, alors que les salaires s’atrophient et se raréfient, la baisse du niveau de l’enseignement s’accentue avec une gratuité quasi improvisée, le système de santé reste précaire, la covid-19 exacerbe la situation, le chômage, l’injustice,… se portent encore bien.
Les priorités seront toujours ailleurs!
Mais bon… rien de vraiment nouveau. Les priorités sont ailleurs. Elles le seront pendant un bon moment.
D’aucuns sont tentés de croire qu’il est plus urgent d’éliminer toute l’influence de Kabila avant de s’attaquer aux autres soucis, quand bien même le projet 100 jours court depuis près de 800 jours !
Tshisekedi a joué et gagné son premier acte. Il a réussi visiblement à renverser la majorité à l’assemblée nationale en faisant tomber le bureau Mabunda. Pour beaucoup, cela est le résultat d’un travail de fourmis. Ça lui aura coûté plus du tiers de son mandat, des billets verts, des promesses à tenir, et peut-être bien plus.
Voilà qui peut entraîner un effet boule de neige. De par sa nature, l’Union sacrée qui se met en place risque de coûter à Tshisekedi plus que l’on ne semble le réaliser. Et les attentes du peuple expérimenteront encore la patience.
Tiens. Après la chute de Mabunda, le défi est de mettre en place un nouveau bureau, de s’attaquer, si cela se pourrait, au sénat et au gouvernement, aux provinces, aux entreprises,… aux communes. Ce, en même temps qu’il faudra réaliser toutes les réformes promises. Ce qui devrait se faire dans les trois années restantes où il faudra aussi organiser les élections. Or, l’économie Congolaise ne se porte pas bien, et le contexte de crise sanitaire mondiale l’enfonce davantage.
Dans cette situation, l’union sacrée risque d’être le plus grand handicap pour le fils Tshisekedi. Il risque de passer davantage de temps à gérer les ambitions, les humeurs et les frustrations de cette pléthore qui rejoint jour après jour son bateau. Ici, la préoccupation de l’ancien premier ministre Adolphe Muzito prend tout son sens : «Si Tshisekedi n’a pas pu s’entendre avec Kabila seul, comment le pourrait-il avec cette multitude de crocodiles?». Les émotifs n’y ont vu que de la jalousie. Et n’y verront pas grand-chose avant longtemps. Mais tout ceci laisse craindre que rien de vraiment concret ne soit fait pour le peuple dans cette mandature.
Hugo Robert MABIALA
Très bien pensé. Félicitations !