La RDC est-elle condamnée à l’échec, ou à reproduire les mêmes erreurs? Que peut changer l’accès progressif de la nouvelle génération des politiques à des postes de responsabilité dans le gouvernement Suminwa?
Dans une interview, Mike Nyembo Nkulu, détenteur d’un Master en droit économique et entrepreneur congolais évoluant en Belgique confie sa lecture avec une bonne dose de pudeur. Pour lui, la présence des jeunes dans le gouvernement «une opportunité de moderniser la gouvernance et de mettre en place des politiques plus adaptées aux réalités contemporaines».
Sans se complaire dans la critique désinvolte, Nyembno analyse, suggère, recommande et plaide pour des approches plus jeunes, plus modernes et transparentes dans la gouvernance. Il propose, entre autres, quelques moyens susceptibles de permettre à la RDC de s’émanciper de la dépendance à la rente minière, en s’appuyant sur les autres richesses que regorgent le pays.
Entendez, les ressources agricoles, halieutiques, énergétiques,… Ce qui favoriserait la diversification de l’économie, la création d’emplois.
Mike Nyembo, vous êtes un entrepreneur congolais vivant en Belgique. Le gouvernement Suminwa compte un certain nombre de jeunes en son sein. Qu’est-ce que cela vous inspire?
Le fait que le nouveau gouvernement Suminwa Tuluka inclut un nombre significatif de jeunes est encourageant et inspirant. Cela démontre une volonté du Chef de l’Etat Félix Tshisekedi de rajeunir la classe politique et d’apporter des perspectives fraîches et innovantes aux défis actuels de la RDC. Car, les jeunes ont souvent une vision plus dynamique et sont plus enclins à adopter des technologies modernes et des approches nouvelles. C’est une opportunité de moderniser la gouvernance et de mettre en place des politiques plus adaptées aux réalités contemporaines.
Qu’entendez-vous par moderniser la gouvernance?
Par moderniser la gouvernance, j’entends notamment la numérisation de l’administration publique. La RDC peut développer des plateformes numériques pour permettre aux citoyens d’accéder aux services publics (certificats, déclarations, paiements) en ligne, réduisant ainsi les files d’attente et la bureaucratie.
Nous pouvons aussi penser à moderniser les systèmes de stockage de données pour éviter la perte d’informations et faciliter l’accès aux documents administratifs; ou créer des portails de données ouvertes où les citoyens peuvent consulter les budgets, les dépenses et les projets gouvernementaux afin de renforcer l’accès à l’information et transparence dans la gouvernance.
Vous parlez aussi des réalités contemporaines. Qu’est-ce que ces jeunes peuvent-ils apporter par rapport aux défis de l’heure?
Le monde a aujourd’hui, entre autres défis, celui de la transition énergétique. La RDC, notre pays, elle, malgré ses énormes potentialités ne produit pas encore assez d’énergie au vu des besoins et des perspectives futures. Le gouvernement devrait s’intéresser davantage au développement de l’énergie verte. C’est-à-dire investir dans des infrastructures solaires et éoliennes pour fournir de l’électricité aux zones rurales et compenser le déficit énergétique, installer des micro-réseaux et des systèmes d’énergie solaire hors réseau pour les communautés isolées ou encore offrir des subventions et des incitations fiscales pour les projets utilisant des sources d’énergie renouvelables.
Mais encore…
Le gouvernement devrait également promouvoir l’entrepreneuriat technologique. Ici, il s’agit de mettre en place des incubateurs et accélérateurs de startups, créer des espaces où les jeunes entreprises technologiques peuvent se développer avec l’aide de mentors, de formations et d’accès au financement, encourager les partenariats entre le gouvernement, les universités et le secteur privé pour soutenir l’innovation technologique, et établir des fonds dédiés au soutien des startups technologiques, en particulier celles qui apportent des solutions aux défis locaux.
Il faudra améliorer les infrastructures de télécommunications. C’est-à-dire étendre l’accès à Internet haut débit dans les zones rurales et urbaines pour faciliter l’inclusion numérique et mettre en place des centres de formation pour aider les citoyens à acquérir des compétences en technologie et en informatique.
A cela s’ajoute la nécessité d’implémenter une gouvernance participative. Je veux dire par-là, que l’on peut utiliser les technologies numériques pour consulter les citoyens sur les décisions politiques et les projets de loi, développer des applications mobiles permettant aux citoyens de signaler les problèmes locaux (infrastructures défectueuses, services publics inefficaces) directement aux autorités.
En adoptant ces mesures, le gouvernement Suminwa Tuluka peut non seulement moderniser la gouvernance en RDC, mais aussi créer un environnement propice à l’innovation et au développement durable, tout en répondant aux besoins contemporains de sa population.
La RDC avec son immense potentiel reste un des pays les plus pauvres de la planète, certains coins du territoire national souffrant de la famine. Comment expliquez-vous cela?
La persistance de la pauvreté en RDC, malgré son immense potentiel, s’explique par plusieurs facteurs. Les conflits armés récurrents ont déstabilisé de nombreuses régions, rendant difficile tout développement économique durable. La corruption systémique a également entravé l’utilisation efficace des ressources naturelles abondantes.
Nous devrons aussi réaliser qu’à côté de la richesse du sous-sol, il y a un énorme potentiel agricole et halieutique. Le président Tshisekedi avait en son temps parlé de la revanche du sol sur le sous-sol. J’encourage cela. Ce choix offre des opportunités d’entrepreneuriat pour les jeunes. Avec 75 millions d’hectares de terres cultivables, il y a un potentiel énorme pour développer des plantations de cultures vivrières et commerciales.
La diversification agricole peut contribuer à la sécurité alimentaire et à l’exportation. Les jeunes entrepreneurs peuvent se lancer dans la transformation des produits agricoles pour ajouter de la valeur et créer des emplois locaux.
Et grâce aux technologies modernes et durables, on peut augmenter les rendements et l’efficacité.
Le potentiel halieutique, estimé à 700 000 tonnes par an, offre une opportunité de développer l’industrie de la pêche, fournissant des emplois et des protéines essentielles à la population.
Que faire pour capitaliser cela ?
Il faut pour cela une politique conséquente. Cela va nécessiter de mettre en place des mécanismes incitatives et de soutien financier et Incitatifs. Par exemple, créer des fonds de soutien et des prêts à taux réduit pour les jeunes entrepreneurs locaux et de la diaspora souhaitant investir dans l’agriculture et la pêche, offrir des exonérations fiscales et des subventions pour les investissements dans les infrastructures agricoles et halieutiques.
Par conséquent, l’Etat doit construire et réhabiliter des routes pour faciliter l’accès aux zones agricoles et halieutiques, ce qui améliorera le transport des produits vers les marchés. Il doit également investir dans le réseau ferroviaire pour relier les zones de production aux centres de consommation et aux ports d’exportation.
Propos recueillis par Hugo Robert MABIALA
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